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ENSEIGNMENT MICMAC
STEPHEN AUGUSTINE
Stephen Augustine


Diagramme pur les enseignements INTRODUCTION LA PREMIERE ÉTAPE DE LA CRÉATION – LE DONNEUR DE VIE LA DEUXIÈME ÉTAPE DE CRÉATION – GRAND-PÈRE SOLEIL LA TROISIÈME ÉTAPE DE LA CRÉATION – NOTRE MÈRE, LA TERRE LA QUATRIÈME ÉTAPE DE LA CRÉATION – GLOOSCAP à l’EST LA CINQUIÈME ÉTAPE DE LA CRÉATION – Grand-Mère LA SIXIÈME ÉTAPE DE LA CRÉATION – LE NEVEU LA SEPTIÈME ÉTAPE DE LA CRÉATION – LA MÈRE LES ORIGINES DE LA NATION ET DES CLANS MICMACS RITUEL MICMAC DU SOUVENIR DE LA CRÉATION

INTRODUCTION

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Dans le récit de la création du peuple micmac, Glooscap fut la première personne créée, la tête couchée dans la direction du soleil levant, les pieds dans la direction du coucher de soleil et les bras en croix, l’un tendu vers le Sud, l’autre le Nord.

C’est ainsi que Glooscap fut créé sur la surface de la Terre, son corps pointant dans les quatre directions. Il fut créé à même tous les éléments de la Terre : la poussière et les feuilles, les plantes, la pierre et le bois. Tout fut rassemblé pour créer Glooscap sur la surface de la Terre.

Mais tout n’a pas commencé par Glooscap. Il apparut durant les sept étapes de la création, représentées par les sept directions sacrées.

La première étape de la création apporta le Donneur de vie. Dans la compréhension micmaque du monde, le ciel ou la direction du haut symbolise la première étape de la création.

Grand-Père Soleil est la deuxième étape de la création. Le soleil, ou la direction du centre, symbolise l’être.

Notre mère, la Terre est la troisième étape de la création. La direction sous nos pieds la représente.

Glooscap couché la tête à l’Est alors qu’il prend forme représente la quatrième étape de la création. À cette direction sont associés l’autorité et les oiseaux.

Grand-Mère dans le Sud représente la cinquième étape de la création. Elle symbolise la sagesse et la connaissance, ainsi que la vie animale.

Le jeune homme – le Neveu – et l’Ouest représentent la sixième étape de la création. Ils symbolisent la jeunesse, la vision, la force, les poissons et la vie marine.

La Mère dans le Nord représente la septième étape de la création. Elle symbolise la compréhension, l’amour et les plantes.

Voilà les sept directions sacrées qui représentent les sept étapes de la création.

MICMAC - Glooscap fut la première personne créée.
MICMAC - Les sept directions sacrées représentent les sept étapes de la creation.

LA PREMIERE ÉTAPE DE LA CRÉATION – LE DONNEUR DE VIE

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La première étape de la création porte le nom de Gisoolg dans la langue micmaque. Lorsque nous disons Gisoolg, cela signifie que vous avez été créé, qu’on vous crée.

Il est important de comprendre que le mot Gisoolg est un verbe, une action. La plupart de nos langues autochtones sont remplies de mots d’action parce que nous croyons que tout est vivant, tout a un esprit. Nous n’avons pas coutume de parler de nos croyances et styles de vie à l’aide de mots symbolisant des objets inanimés. Nos aînés nous ont enseigné à montrer par l’exemple plutôt qu’à simplement expliquer les choses.

Aujourd’hui, je partagerai uniquement l’aspect parlé du récit de la création, en français. Il faudrait du temps pour donner des exemples détaillés permettant l’approfondissement des croyances et styles de vie micmacs traditionnels. Essayez plutôt de comprendre que ces enseignements portent sur un mode de vie et une expérience qui s’applique directement à toute vie, visible ou invisible.

Par conséquent, le Donneur de vie est la première action. Il est le mystère de la création qui existe tout autour, se présente sous forme de grands cercles et commande notre admiration. Nous l’apercevons dans les fleurs et les feuilles qui sortent au printemps pour s’épanouir sous le soleil, le vent et la pluie de l’été; dans le soleil qui gagne en puissance au fil des jours et l’eau qui se met à fuir; dans les plantes qui perdent leur vitalité à l’automne, meurent et viennent offrir leurs nutriments aux racines et à la terre pour créer de nouveau – la vie donnant la vie. Pris dans leur ensemble pour ne former qu’un, toute cette splendeur, ces cycles de vie et de mort contiennent le mystère de l’existence et font partie des merveilles de la création qui nous entoure.

Dans le contexte spirituel micmac, nous levons les yeux au ciel en reconnaissance du Créateur, le grand Donneur de vie, qui vient avant tout et contient tout.

MICMAC - La première étape de la création porte le nom de Gisoolg.
MICMAC - Les plantes perdent leur vitalité à l’automne.

LA DEUXIÈME ÉTAPE DE CRÉATION – GRAND-PÈRE SOLEIL

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La deuxième étape de la création est le soleil que nous appelons Nisgam, ou grand-père. Grand-Père Soleil nous donne les ombres. Lorsque nous disons « ombre » en micmac, nous faisons référence aux esprits de nos ancêtres. Les ombres que Grand-Père Soleil nous offre sont les esprits de nos ancêtres.

Selon nos aînés, nous sommes liés à notre ombre, aux esprits de nos ancêtres, par nos pieds et notre sang, qui nous fixent à la Terre. Notre sang est leur sang coulant dans nos veines, se transformant en nous. Nous portons donc en nous les yeux, les visages et les sourires de nos ancêtres, leurs mouvements, leurs manières et leur identité. Au moment de nous élever vers le soleil, nous réfléchissons sur la Terre notre ombre, nos ancêtres.

Ainsi, nous incarnons tous nos ancêtres, portons en nous leurs comportements, partageons leurs cœurs et leurs poumons tandis que nous respirons l’air même qu’ils ont respiré. Lorsque nous faisons une offrande à la Terre lors de cérémonies, nous reconnaissons le lien qui nous unit du soleil à notre mère, la Terre, où reposent nos ancêtres. Grand-Père Soleil nous enseigne tout cela en nous donnant nos ombres.

Ainsi, nous sommes au centre du monde, là où passe Grand-Père Soleil pour rejoindre note mère, la Terre. Ce centre est l’une des sept directions sacrées, parce que notre ombre est le lien qui unit le monde spirituel au monde physique. Et nous sommes l’incarnation de ce centre, également représenté dans Grand-Père Soleil.

MICMAC - Grand-Père Soleil.

LA TROISIÈME ÉTAPE DE LA CRÉATION – NOTRE MÈRE, LA TERRE

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La troisième étape de la création, sous nos pieds, est notre mère, la Terre, que nous foulons et qui contient les esprits de nos ancêtres. Dans notre langue, la terre se nomme Oosgit et le dessus du tambour, Oosgitjeou. Nous dirions Oosgit ga’amit pour décrire une personne debout sur un tambour. On appelle une personne debout Oosgitjinoo, c’est-à-dire « la personne qui s’est libérée de la surface de la terre et se tient debout ». Oosgitjinoo fait référence au peuple. Comme en français, Ootsit gamoo s’applique aussi à la terre qui recouvre la surface de la Terre, la matière sur laquelle nous marchons et que nous partageons avec tous les êtres vivants. C’est pourquoi nous appelons notre mère, la Terre. Et quand je dis qu’elle est notre mère, j’utilise le mot Oogitjinoo.

Par conséquent, les mots que nous employons pour parler du peuple, de la terre, de la mère et du tambour proviennent tous du terme qui fait référence à « la surface sur laquelle nous nous tenons debout et que nous partageons avec toutes les créatures de surface ».

Ainsi, lorsque nous parlons du tambour, nous parlons de notre mère, la Terre. Lorsque nous entendons battre le tambour, nous entendons battre le cœur de notre mère, la Terre. Par conséquent, lorsque nous jouons du tambour, nous reconnaissons que nous sommes les enfants de la Terre et que nous envoyons un message à notre propre mère, lui disant : « Nous vous entendons, nous comprenons et nous reconnaissons le battement de votre cœur de la même façon qu’un nouveau-né reconnaît le battement de cœur de sa propre mère. » Nous l’appelons donc Oogitjinoo, qui signifie mère.

MICMAC - Lorsque nous parlons du tambour, nous parlons de notre mère, la Terre.

LA QUATRIÈME ÉTAPE DE LA CRÉATION – GLOOSCAP à l’EST

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À la quatrième étape de la création, un éclair frappa la Terre et, sur sa surface, créa une personne à même les éléments – la poussière, les feuilles, les plumes, les os, la pierre et le bois. C’est ainsi qu’à la quatrième étape de la création apparut Glooscap, la tête couchée dans la direction du soleil levant, à l’Est, les pieds dans la direction du coucher de soleil et les bras en croix, l’un tendu vers le Sud, l’autre le Nord.

Un premier hiver passa et Glooscap fut de nouveau frappé par un éclair. Cette fois-ci, il reçut ses doigts et ses orteils et toutes ses autres extrémités. Il reçut également les sept parties sacrées de sa tête : deux oreilles, deux yeux, deux narines et une bouche. Il obtint tout cela alors qu’il était toujours couché sur la surface de la Terre.

Un autre hiver passa, le troisième, avant que les Esprits du Tonnerre, les nuages, la pluie, le tonnerre et les éclairs, ne frappent de nouveau la Terre, atteignant Glooscap là où il reposait. Enfin libéré de la surface de la Terre, Glooscap se leva. Sans attendre, il leva les yeux au ciel et dit : « Gisoolg, wela’lin – merci Donneur de vie de m’avoir donné ma vie. ».

Puis il se tourna vers Grand-Père Soleil et vers l’intérieur, et dit : « Nisgamej wela’lin - merci, Grand-Père Soleil, de m’avoir donné mon ombre, mon esprit. » Il regarda la Terre sous ses pieds et dit : « Ma mère, merci d’avoir donné de votre être, de votre substance, pour me créer. »

Il se tourna ensuite sept fois sur lui-même et commença à voyager dans la direction du coucher du soleil, le chemin de Grand-Père. Il suivit ce chemin jusqu’à ce que Grand-Père disparaisse, et arriva à la terre des montagnes et de l’océan, à l’Ouest.

Il décida ensuite de se diriger vers le Sud et atteignit la terre du sol rouge, puis reprit la direction nord jusqu’à ce qu’il atteigne la terre de la glace et de la neige. Il décida alors de retournerner là où il avait été créé à l’Est. Il avait traversé tout le continent.

Là, à l’Est, tôt le matin, il vit Grand-Père Soleil, tout brillant, poindre au-dessus de l’horizon. Il poursuivit sa route vers l’Est jusqu’à ce qu’il arrive enfin à l’endroit où il avait reçu sa création.

Il resta là, au milieu d’un cercle d’étincelles apparu le jour de sa création, lorsque les trois éclairs avaient frappé la Terre.

Debout, au milieu du cercle, il leva les yeux vers Grand-Père Soleil pour savoir ce qu’il faisait sur la Terre. Mais avant même de pouvoir lui demander, il vit un oiseau dessinant des cercles dans le ciel de midi. L’oiseau vint atterrir devant lui.

L’oiseau avait la tête blanche. L’aigle à tête blanche dit : « Mon nom est Git’poo, ou Gooloo. Je suis l’oiseau qui atteint les sommets les plus hauts. Le Créateur, Gisoolk, Grand-Père Soleil et notre mère, la Terre, ont fait de moi le messager et m’ont chargé de venir te dire que le reste de ta famille te joindra bientôt pour t’aider à comprendre quelle est ta place dans le monde. »

Glooscap fut heureux d’avoir reçu la visite de l’aigle, et le regarda s’éloigner dans le ciel. Lorsqu’il prit son envol, l’oiseau laissa une plume flotter derrière lui dans l’air. Avant qu’elle ne touche le sol, Glooscap l’attrapa et leva les yeux au ciel. La plume d’aigle à la main, il se sentait très puissant. Depuis ce jour, la plume de l’aigle est un symbole de puissance liant notre peuple au Donneur de vie, à Grand-Père Soleil et à notre mère, la Terre.

MICMAC - Glooscap à l’est

LA CINQUIÈME ÉTAPE DE LA CRÉATION – Grand-Mère

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Glooscap se mit à voyager et aperçut une veille femme assise sur une roche. Il s’approcha et lui demanda : « Qui êtes-vous? D’où venez-vous? » La veille femme le regarda et dit : « Tu ne me reconnais pas? Je suis ta grand-mère. Je dois mon existence à cette roche sur le sol. De la rosée se forma sur cette roche tôt ce matin et, grâce au Donneur de vie, je reçus le corps d’une veille femme sage et savante. Si tu respectes ma sagesse et mon savoir, cette roche t’aidera à comprendre quelle est ta place dans le monde. »

L’arrivée de sa grand-mère rendit Glooscap heureux. Il était reconnaissant d’avoir quelqu’un pour lui apprendre tout ce qu’il y avait à savoir à propos de la vie sur notre mère, la Terre. Une femme très sage, Grand-Mère dit à Glooscap qu’elle allait lui apprendre tout sur le ciel, Grand-Père Soleil, Grand-Mère Lune, les étoiles, la route des esprits ou des ombres, la Voie lactée et une foule d’autres choses. Elle allait lui montrer tout ce qu’il y a à savoir sur le vent, les saisons, les marées, et les caractéristiques et comportements des plantes et animaux. Elle allait lui apprendre à cuisiner, à confectionner des vêtements et à construire un abri. Glooscap fut heureux quand sa grand-mère vint dans le monde.

Peu après, Glooscap vit un petit animal qui s’affairait autour. C’était Abistanooj, une martre. Il lui dit : « Abistanooj, mon frère, vient ici; j'ai un service à te demander. » Abistanooj s'approcha et répondit : « Que veux-tu, mon frère Glooscap? » Et Glooscap lui dit : « Eh bien, Je veux te demander si tu peux sacrifier ta vie. Grand-Mère et moi devons continuer à vivre; nous devons compter sur ton corps, parce que tu peux nous donner ce dont nous avons besoin. Ta peau peut nous servir de vêtements, ta chair de nourriture, tes os d’outils et tes organes internes, de remèdes. »

L'animal regarda le sol puis Glooscap et dit : « Oui, prends ma vie. Je te la donne pour que Grand-Mère et toi puissiez vivre. » C’est ainsi que Glooscap prit Abistenooj et l’amena à Grand-Mère, qui tordit le coup du petit animal et l’étendit sur le sol. Entre-temps, la plume d’aigle à la main, Glooscap leva les yeux au ciel et dit : « Gesoolg, pardonnez-moi d’avoir enlevé la vie à l’animal, mon frère. Grand-Père Soleil, pardonnez-moi d’avoir pris l’ombre de l’animal, mon frère. Notre mère, la Terre, pardonnez-moi d’avoir pris une partie de vous pour ma création, ma subsistance. »

Pendant ce temps, Grand-Mère préparait l’animal. Elle dit à Glooscap : « Ramasse les sept étincelles qu’il reste des éclairs responsables de ta création et place-les au centre de la fosse. Prends sept morceaux de bois sec et place-les au-dessus des sept étincelles. Invite ensuite notre cousin la tornade, Wejosin, à se joindre à nous. » Glooscap fit ce qu’elle demanda, et Wejosin vint tourbillonner puis repartit. Les sept étincelles s’allumèrent sous l’effet du vent et les sept morceaux de bois se mirent à brûler. C’est ainsi que fut créé le premier feu ou le Chibouktou, comme nous l’appelons dans notre langue – le Feu du Grand-Esprit. Et c’est sur ce Feu du Grand-Esprit que Grand-Mère fit cuire l’animal, la martre. Ils partagèrent l’animal. Ils se régalèrent de viande pour célébrer l’arrivée de Grand-Mère dans le monde.

Grand-Mère enseigna donc le feu à Glooscap et sa relation avec notre survie. Ils vécurent ensemble et Grand-Mère lui transmis son savoir. Elle confectionna leurs vêtements et fabriqua leurs outils avec l’animal qu’avait rapporté Glooscap, et lui montra tout ce qu’il devait savoir sur la survie.

MICMAC - Glooscap se mit à voyager et aperçut sa Grand- Mère assise sur une roche.
MICMAC - Glooscap demande à Abistanooj s’il peut sacrifier sa vie pour que Grand-Mère et Glooscap puisse vivre.

LA SIXIÈME ÉTAPE DE LA CRÉATION – LE NEVEU

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Un jour, pendant que Grand-mère cherchait du bois pour nourrir le feu, Glooscap décida d’aller se promener près de l’océan.

Alors qu’il marchait dans l’herbe haute et parfumée, un jeune homme se dressa devant lui. Et bien qu’il fut jeune, il était grand et costaud. Ses yeux blancs pétillaient. Glooscap le regarda et dit : « Qui es-tu? D’où viens-tu? »

« Mon oncle, vous ne me reconnaissez pas? Je suis le fils de votre sœur. Je dois ma vie à Wejosin, la tornade. Quand elle traversa l’océan, dans la direction du soleil levant, la tornade laissa derrière elle un bouillonnement d’écume. Le vent balaya l’écume sur la rive, emportant tout ce qui se trouvait sur son passage, dont des roches, des plumes et du bois, qu’il déposa dans l’herbe haute et parfumée. Et là, avec l’aide du Donneur de vie, Grand-Père Soleil et notre mère, la Terre, je reçus le corps d’un jeune homme. »

Il dit ensuite à Glooscap : « Je suis fort. Mes bras et mes jambes sont très forts; je peux aider Grand-Mère et vous. Mais je suis aussi visionnaire, expliqua-t-il. Je vous regarde. » Ainsi, nous enseignent nos aînés, Glooscap devait comprendre que les jeunes gens l’observaient et qu’il devait vivre sa vie de façon à laisser aux générations futures un héritage de vie et de survie.

Le jeune homme dit ensuite : « J’apporte les dons de nos ancêtres. » Ainsi, les aînés nous enseignent que les petits enfants sont les dons de nos ancêtres, et portent en eux les caractéristiques et les images de nos ancêtres : nos grands-pères, nos grands-mères, ainsi de suite.

Glooscap fut heureux que son neveu soit venu sur la Terre partager sa vie et offrir sa force et sa vision – parce que les jeunes voient au-delà de nous; ils voient l’avenir et nous servent de guide afin que nous puissions partager notre survie avec les générations futures. Ayant compris cela, Glooscap et son neveu retournernèrent auprès de Grand-Mère.

Et parce que le neveu devait son existence à l’océan, Glooscap fit appel aux poissons. Il leur dit : « Mes frères et sœurs, poissons des eaux et des rivières et des océans, rejoignez la rive et offrez votre vie. Nous avons besoin de vous pour survivre. » C’est ainsi que les poissons rejoignirent la rive, et que Glooscap les apporta à Grand-Mère. Il s’excusa d’avoir pris la vie et l’ombre des poissons. Et il s’excusa auprès de notre mère, la Terre, d’avoir pris de ses éléments pour assurer sa propre subsistance et celle de Grand-Mère et de son neveu.

Grand-Mère prépara un festin de poisson pour célébrer l’arrivée du jeune homme, le neveu de Glooscap. Ils mangèrent et partagèrent leur vie, et Grand-Mère continua à leur apprendre tout ce qu’il y avait à savoir sur le monde et les moyens de survie sur la terre.

MICMAC - Glooscap fut heureux que son neveu soit venu sur la Terre.

LA SEPTIÈME ÉTAPE DE LA CRÉATION – LA MÈRE

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Un jour, Glooscap était seul près du feu qu’il venait d’alimenter. Une femme apparut et vint s’asseoir à ses côtés. Elle passa son bras autour de lui et dit : « As-tu froid, mon fils? » Il la regarda et répondit : « Qui es-tu? D’où viens-tu? »

Elle poursuivit : « Je suis ta mère; je suis Neganogonim gossees. Tôt ce matin, j’étais une feuille qui se détacha de son arbre et tomba par terre. La rosée se forma sur la feuille et là, avec l’aide du Donneur de vie, de Grand-Père Soleil et de notre mère, la Terre, je reçus le corps d’une jeune femme. »

Elle dit : « J’apporte la force à mes enfants. J’apporte les couleurs du monde : le bleu du ciel, le jaune du soleil, le vert de l’herbe, des arbres et des feuilles, le rouge de la terre, le noir de la nuit et le blanc de la neige. Et j’apporte la compréhension et l’amour, pour que mes enfants apprennent à prendre soin les uns des autres, à compter les uns sur les autres et à s’aimer les uns les autres. » C’est ainsi que la mère de Glooscap vint au monde.

Glooscap fut heureux qu’elle soit venue lui apprendre comment aimer, comprendre et partager, lui enseigner que nous comptons tous les uns sur les autres pour survivre. En reconnaissance de sa mère, Glooscap demanda à son neveu d’aller cueillir la nourriture venant des plantes, des racines, des baies, des noix, des fruits, ainsi de suite. La nourriture fut rassemblée et Grand-Mère prépara un festin pour célébrer l’arrivée de la mère de Glooscap dans le monde, sa création.

Ils se réunirent tous et partagèrent. Et la Grand-Mère de Glooscap, Nogami, enseignait tout ce qui devait être enseigné. Et le neveu observait et aidait. Glooscap était là pour leur commander, tout en respectant les enseignements des aînés, en respectant la vision et la force des jeunes, et les dons des esprits et des ancêtres qu’ils offrent, et en respectant l’enseignement de sa mère de s’aimer mutuellement, de prendre soin des autres et de compter les uns sur les autres. C’est ainsi qu’ils eurent une très bonne vie.

MICMAC - La mère de Glooscap s’appelle Neganogonim gossees.

LES ORIGINES DE LA NATION ET DES CLANS MICMACS

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Un jour, l’aigle revint rendre visite à Glooscap. Il expliqua à Glooscap que sa Grand-Mère et lui devaient quitter ce monde pour se rendre à l’Ouest et au Nord. Ils devaient traverser dans le monde spirituel et y rester jusqu’à ce que le peuple micmac soit menacé d’extinction et ait besoin de leur aide.

L’aigle dit également à Glooscap que sa mère et son neveu devaient prendre soin du Feu du Grand-Esprit. Il ajouta : « De ce feu jaillira une étincelle qui, en frappant le sol, fera naître une femme. Une autre étincelle jaillira et une autre femme sera créée, et puis une autre, jusqu’à ce qu’il y ait sept femmes. Puis, d’autres étincelles jailliront au fil du temps et sept hommes seront créés. Ensemble, ces sept hommes et sept femmes formeront sept familles. » Le peuple micmac est l’une des sept familles issues des étincelles.

L’aigle expliqua à Glooscap qu’après un certain temps, une fois que les sept familles auront appris les enseignements, ils quitteront la région du grand feu et se disperseront. Le peuple micmac se retrouva dans les Maritimes. Et afin de ne pas oublier la signification et le sens des sept étapes de la création, nous nous sommes séparés en sept clans, ou maouiomis. Pendant des milliers d’années, les chefs traditionnels de ces maouiomis ont conservé le savoir et l’histoire de ces sept territoires, ces sept Chibouktous, ou Feux sacrés. Et notre mémoire de ces territoires remonte à une époque précédant la fonte des glaciers, il y a de ça des milliers d’années, et se rend à aujourd’hui, en passant par l’arrivée des Européens et la signature de nos traités, comme il est écrit dans notre propre histoire.

MICMAC - Le peuple micmac est l’une des sept familles issues des étincelles.

RITUEL MICMAC DU SOUVENIR DE LA CRÉATION

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Donc, une fois sept hivers passés, les sept clans revinrent avec leurs sept feux raviver le feu original, qui représente les quatre premières étapes de la création – pour honorer le Donneur de vie, Grand-Père Soleil, notre mère, la Terre, et Glooscap, et pour se rappeler l’éclair et les étincelles qui leur avaient donné la vie et avaient créé le Feu du Grand-Esprit. Les sept clans placèrent sept pierres dans le feu pour représenter les sept premières étapes de la création, et sept pierres supplémentaires pour les sept familles originales issues de la première étincelle. Ils y placèrent sept autres pierres pour les clans de chacune de ces sept familles. Ensuite, ils rassemblèrent leurs remèdes, leurs plantes médicinales, leurs racines et leurs feuilles, et sept pierres de plus pour représenter les sept grands remèdes que ces familles apportaient. En tout, ils avaient jeté 28 pierres au feu.

Notre suerie est formée de sept jeunes arbres recourbés et sa porte est orientée vers l’Est. Les sept chefs héréditaires pénètrent dans la hutte, le ventre de notre mère, la Terre, et demandent au peuple de couvrir la hutte de sept peaux d’animal. Et les chefs demandent ensuite que soient apportées les sept premières pierres, qui représentent la Grand-Mère. Nous fermons alors la porte puis versons de l’eau sur ces pierres pour nous rappeler comment Grand-Mère fut créée à même la pierre quand la rosée s’y forma et fut chauffée par Grand-Père Soleil – comment elle est née de l’union de la lumière et de la chaleur – le feu et l’eau convergeant sur la pierre. La vapeur purifie nos corps et notre sueur retournerne à notre mère, nous liant à la création, à nos ombres. Les portes s’ouvrent alors et nous chantons nos chants et partageons le calumet et le foin d’odeur. Puis nous demandons une fois, deux fois, trois fois que soient apportées sept autres pierres, et faisons offrande à chacun des points cardinaux et à tout ce qu’ils nous ont donné : les enseignements de la Grand-Mère et des aînés, le neveu et nos mères. Et lorsque la porte s’ouvre, tout le monde fait le tour du cercle et ressort, comme des enfants qui entrent dans le monde.

C’est ainsi que nous rendons honneur aux sept étapes de la création et aux sept directions sacrées dans nos cérémonies : celles de la suerie, du foin d’odeur qui honore le neveu, de l’offrande du tabac qui rappelle la création de la Mère à partir d’une feuille et du calumet qui symbolise les enseignements de la Grand-Mère et de la Mère en joignant ensemble la pierre et la plante, le fourneau de pipe en pierre et le tuyau en bois.

La fumée du foin d’odeur et du calumet transporte les mots et les prières de tous ceux que nous invitons dans notre cercle de cérémonie. Nous offrons cette fumée et ces prières aux sept directions. Nous levons les yeux au ciel pour remercier le Donneur de vie de nous avoir donné la vie. Nous nous tournons vers l’intérieur pour remercier Grand-Père Soleil de nous avoir donné notre ombre. Nous nous tournons vers notre mère, la Terre, et la remercions d’avoir donné d’elle-même pour nous créer. Nous nous tournons vers l’Est pour remercier Glooscap de son autorité et pour nous rappeler l’aigle et l’oiseau. Nous nous tournons vers le Sud, vers Grand-Mère, née de la pierre, et nous nous rappelons ses dons de la sagesse et les animaux. Nous nous rappelons le neveu, qui est allé vers l’Ouest – avec en lui le don de la force et le regard des ancêtres tourné vers l’avenir – et apporta le poisson. Nous nous tournons vers le Nord, où la Mère est née de la feuille d’un arbre, symbole des plantes, des couleurs et des enseignements de l’amour et des façons de prendre soin les uns des autres.

En regardant vers le ciel, la terre et l’intérieur, et dans les quatre directions, nous faisons participer ces entités à nos cérémonies. Tout ce que nous pouvons voir y est, accompagné de tous les éléments de la vie que nous partageons sur la surface de notre mère, la Terre, tout autour. Et nous avons la tête en partie dans le monde physique, en partie dans le monde spirituel; un pied dans le monde de nos ancêtres et un pied tourné vers l’avenir. C’est ainsi qu’au centre, nous communiquons avec tout le cycle de la vie dans toutes ses dimensions, en reconnaissance de la façon dont la vie débute et relie tout.

En l’honneur de mes aînés et de ma grand-mère, Wela’lin.

MICMAC - Sept pierres dans le feu représentent les sept premières étapes de la creation.